Côte d’Ivoire : Origine des Boigny, des Thiam et de Yamoussoukro

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Félix Houphouët-Boigny
Félix Houphouët-Boigny
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Le témoignage d’Houphouët-BoignyTel un testament destiné à la postérité, le père de la nation ivoirienne, Félix Houphouët-Boigny a, de son vivant, consigné l’histoire de sa famille et de Yamoussoukro, la capitale politique et administrative de Côte d’Ivoire, dans un livre. Dicté par Félix Houphouët-Boigny lui-même, ses propos ont été retranscrits par Pierre Cheynier.

Intitulé « Yamoussoukro, Cœur de la Côte d’Ivoire », ce livre, édité il y une cinquantaine d’années par Fraternité Matin, n’a pas été produit en grande quantité ni diffusé en masse. Seuls quelques tirages ont été distribués à des parents et amis du premier président de la République de Côte d’Ivoire. Nous vous proposons quelques extraits.

Une famille née de l’amour La date de l’arrivée à Kami du premier Boigny (Voigny N’dri) parait se situer dans la première moitié du XIXème siècle. Le destin de cette famille sera donc marqué par l’évolution d’une époque nouvelle. Celle de l’irruption des blancs, de la colonisation, puis de la lutte pour l’égalité etle respect des droits fondamentaux, à travers le plus illustre de ses fils, HouphouëtBoigny. Ce sera l’époque de la naissance et du développement de la nation ivoirienne indépendante.

A lire aussi : Félix Houphouët-Boigny : Un modèle pour la jeunesse ivoirienne et africaine » (Jean-Noël Loucou)

À sept kilomètres de Yamoussoukro, à l’écart de l’actuelle route qui conduit à Bouaké, se cache toujours Kami. À l’abri de ses buissons épineux, constitués en rempart impénétrable, le petit village semble dormir. A l’époque où apparaissent les Boigny, le chef de Kami compte parmi ses filles une certaine Adua. Et l’une des filles d’Adua n’est autre que Kokobré (Koko la noire).

Un inconnu arrive un jour sans crier gare. Son jeune frère et ses gens l’accompagnent. C’est une petite troupe. Ce ne sont pas des Baoulés. Nul ne sait d’où ils viennent ; on dit seulement, pointant le doigt vers le soleil levant : « de l’autre côté » (donc, apparemment, d’au-delà du fleuve Comoé). La tradition, dans la famille Boigny de Yamoussoukro, n’apporte pas, sur ce point, plus ample précision. L’homme raconte qu’il a perdu ses sœurs et ses nièces et que, s’il était resté « là-bas », ceux qui ont tué les siens allaient s’emparer de sa fortune.

Le Président Houphouët-Boigny nous a ainsi dépeint son trisaïeul Boigny N’Dri, tel que la tradition familiale en a conservé le souvenir, et dont lui-même, lors de son entrée dans la vie politique, a voulu relever le nom : « C’était un type gaillard, fort, avec des arcades sourcilières très prononcées ; il n’était pas beau ; mais la plus jeune fille d’Adua , de Kami, a dit : « c’est celui-là que j’attendais, c’est lui que je veux épouser ».

Cette arrivée de l’aîné des Boigny peut être située aux alentours de 1847-1852. Quelques années plus tard, vers 1860, Boigny N’dri, ou encore « Grand Broigny » et Koko la noire, celle qui l’avait préféré, quitteront le village de Kami. C’est que, si le mariage a bien eu lieu – car en pays baoulé on ne marie guère une fille contre son gré – il n’en demeure pas moins que la jeune princesse n’avait pas été satisfaite, des projets d’alliance que l’on formait pour elle. La voilà en ménage avec un « étranger ».

Et malgré la règle matrilinéaire qui fera de leur descendance de vrais Baoulés, les villageois sauront si bien leur faire sentir la distance que Koko elle-même, ulcérée, réclama ses droits ; ils lui seront reconnus sous la forme de terres suffisamment à l’écart de Kami ; les forêts sur l’emplacement desquelles s’implantera plus tard Yamoussoukro deviennent son domaine. Quant au second Boigny, frère de Boigny N’Dri, ou son cousin – mais le mot« cousin » n’existe pas en baoulé, c’est un « frère » – son aîné l’installera de l’autre côté du Bandama, sur la rive aurifère de ce fleuve. Ce village qui, au contraire de Yamoussoukro, ne s’est guère développé, c’est Grougui, modeste hameau dont la population n’atteint guère les cent cinquante âmes.

Les descendants de ce cadet Boigny qui, par mariage, s’allièrent aux gens du voisinage et de ce fait des unions gouro, ont cependant conservé les noms familiaux originels ; on rencontre, chez eux des Boigny, des Kouassi N’go, des Yablé. Les liens de parenté ont été maintenus, malgré le développement inégal de Yamoussoukro et de Grougui. Un des descendants de ce cadet Boigny est aujourd’hui le professeur Tahiri Zagret, directeur de l’Institut pour la Technologie de l’Industrialisation des Produits Agricoles Tropicaux (ITIPAT) ; la tante du professeur Zagret vit elle-même dans la cour familiale du village-mère des sœurs du président Houphouët-Boigny. Mais revenons à Yamoussoukro.

Boigny N’dri et Kokobré forment un couple heureux. Ils auront ensemble cinq enfants. C’est leur fils aîné, Kouassi N’go qui donnera son premier nom au nouveau village (1). Leur petite-fille, nana Yaa N’so (2), nièce de Kouassi N’go, le développera. Sous leur arrière-petit-fils, un autre Kouassi N’go, neveu de Yaa N’So, ce village sera promu chef-lieu (supérieur pour les Akouè, de canton pour l’administration coloniale). Sous le neveu de ce dernier, il devient tel que nous le voyons aujourd’hui : le beau, le plus grands des « villages ». Yamoussoukro est donc bien une création de l’amour, le village d’une famille bénie de Dieu, et de sa réussite. Ce village, Félix Dia Houphouët-Boigny, devenu Président de la République, l’ouvre à la Côte d’Ivoire tout entière lui donnant des dimensions nationales.

Il l’ouvre au Rassemblement Démocratique Africain (RDA, ndlr), et c’est le village où souffle l’esprit ; il l’ouvre à ses amis du monde entier, et Yamoussoukro devient le point de rencontres internationales où se débattent les problèmes, se mûrissent les projets, où se prennent dans un cadre propice à la calme réflexion, les décisions ivoiriennes, africaines, mondiales que son « chef » veut être de sagesse, d’amour et de paix. Outre Kouassi N’go, les enfants de Boigny N’dri et de Kokobré seront : Nongan, Yaablé, Boigny et Adua. Les descendants de ces cinq Boigny peuplent les cinq parties du village. L’héritage, nous l’avons dit, se transmet, en pays akan, par les femmes. Ce sera donc à Adua, la benjamine (à qui on a donné le nom de la première aïeule, sa grand-mère) que reviendra la charge d’assurer la postérité. Cette Adua épousera Ahounou, chef du plus proche village : Morofé.

« C’est que, remarque en passant le Président Houphouët-Boigny, ces Boigny-là étaient des gens « extrêmement intelligents » ; d’aucuns prétendaient les traiter en étrangers ? Leurs filles ont épousé des chefs, et les familles de ces chefs ont aujourd’hui du sang des Boigny. C’est ainsi, et non par la force des armes, que ces derniers ont su s’imposer (3) ». Adua, de son mariage avec Ahounou, aura de nombreux enfants ; plusieurs mourront en bas-âge ; d’autres, qui n’ont pas joué de rôle précis, ne seront pas cités ici. Nous retiendrons nana Yaa N’So (Yamoussou, dont le village porte le nom), Aka Amoin, Adio et Brou (la dixième). Yaa N’so, la reine, n’aura pas d’enfant. Adio mettra au monde un sourd-muet qui ne vivra pas longtemps.

C’est Brou qui, pour cette quatrième génération, assumera la charge de la descendance. Les enfants de Brou seront : Kimou N’Dri (dite N’Dri Kan), Kouassi N’go, Kimou M’bra, Kimou (dite UYaabl ») et Yébouet son jumeau, Kimou Yamoussou (dite Yaa Kan). Nous arrivons ainsi à la génération actuelle. N’dri Kan épouse N’doli Houphouët de la tribu N’zipri, de Didiévi (4) ; ce sont les parents de Félix Houphouët-Boigny, de ses trois sœurs aînées (la première qui n’aura pas longtemps vécu, la seconde Fetai, la troisième Adua), d’une plus jeune sœur et de son frère cadet Augustin Houphouët eux aussi décédés.

Nous reviendrons plus loin à Félix Houphouët. Pensant que les électeurs trouveront un intérêt à l’ensemble de cette généalogie, nous poursuivrons. Fetai ‘veuve de Koba, chef du canton Nanafouè d’Attiégouakro) et « nana » Adua n’ont pas de descendance directe. Félix Houphouët-Boigny a eu, d’un premier lit, quatre fils et une fille : Félix (décédé), Augustin, François, Guillaume, et Marie ; d’un second lit : Florence ; et pour fille adoptive : Hélène. Cette Hélène Houphouët-Boigny, le Président nous le précise avec un sourire attendri : « c’est la pure, la descendante directe de la reine Pokou, la petite-fille du roi des Baoulés, Anoungbré. Elle porte mon non, mais elle est ma suzeraine ; je suis son vassal ». Hélène a deux frères et sœur : Baptiste et Monique ; et si Baptiste avait eu quinze ans révolus à la mort du roi Kouakou Anoungbré, c’est lui qui règnerait aujourd’hui en lieu et place de l’actuel « chef supérieur » Kouamé Guié. Comment Hélène est-elle entrée dans la famille Houphouët-Boigny ?

La tradition baoulé veut que l’on confie, pour l’élever, un enfant à la femme que le ciel n’a pas comblée. Mme Marie-Thérèse Houphouët-Boigny n’ayant pas eu elle-même d’enfant, sa parente, fille d’Anoungbré , est venue lui confier une de ses filles. Chez les Baoulés, d’ailleurs, on n’adopte pas vraiment. Une famille noble confie l’enfant à une autre famille même moins noble, pour en assurer l’éducation. L’enfant, alors, appartient aux deux familles. Il pourra, à son gré, demeurer dans la seconde, retourner dans la première… Les enfants d’Augustin-Boigny, frère cadet du Président de la République, et décédé en 1939, sont Dia Augustin Houphouët-Boigny, et Monique, veuve d’André Dahouet qui fut député et Secrétaire général d’une des sous-sections du Parti (le PDCI-RDA, ndlr) à Bouaké (Bouaké – Koko ou Bouaké II).

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Les tantes du Président Houphouët, sœurs de sa mère, étaient Kimou M’bra, mère de Kouassi N’go (III) actuel chef de canton, Kimou Yaablé mère de Dinimba (5), et Kimou Yamoussou Kan dont les deux petites-filles sont Mariétou Sow et Berthe Sow. Berthe Sow, a eu deux enfants ; quant à Mariétou, ses sept enfants, nous dit le Président avec une légitime fierté, sont tous universitaires, ce sont : Daouda, Boubakar, Augustin, Aziz, Ana N’Deye, Yamoussou et Tidiane. « Tous ceux-là sont des Boigny ; ils peuvent donc, précise Félix Houphouët-Boigny, être chef de famille, porter le nom de Boigny accolé à celui de leur père ».

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