Guinée : De Sékou Touré à Mamadi Doumbouya, l’incroyable histoire du gisement de fer de Simandou

0
85
Le gisement de fer de Simandou en Guinée
Le gisement de fer de Simandou en Guinée
=

Niché au cœur des monts du Simandou, dans le sud-est de la Guinée, le gisement de fer du même nom alimente depuis plus de soixante ans les rêves de prospérité du pays. Avec des réserves estimées à plus de huit milliards de tonnes, il s’agit de l’un des plus importants gisements de fer non exploités au monde. Pourtant, son exploitation a longtemps relevé du mythe, entre ambitions politiques, manœuvres géopolitiques et scandales de corruption.

L’histoire commence dès l’indépendance, avec Sékou Touré. Le père de la nation guinéenne caresse déjà l’idée de valoriser les richesses minières du pays à travers des partenariats internationaux. Mais le contexte de guerre froide, les tensions internes et le manque d’infrastructures freinent les avancées. Simandou reste alors une promesse non tenue, un « éléphant blanc » enfoui dans la roche.

A lire aussi : Guinée : Les citoyens réagissent face à la nouvelle Constitution

Ce n’est que dans les années 1990 que le projet prend une nouvelle tournure, avec l’arrivée du géant minier Rio Tinto. L’entreprise anglo-australienne réalise des travaux d’exploration, mais le manque d’investissements retarde toute exploitation concrète. Puis surgit Beny Steinmetz, homme d’affaires franco-israélien, à travers sa société BSGR. Ses méthodes controversées et ses démêlés avec la justice internationale donnent une nouvelle tournure à l’affaire, plongeant Simandou dans une saga judiciaire qui attire l’attention du monde entier.

Sous la présidence d’Alpha Condé, le gouvernement tente de reprendre le contrôle. Des réformes sont engagées, mais le projet s’enlise dans de nouveaux soupçons de corruption et des tensions avec les partenaires étrangers. La Guinée, riche de son sous-sol, semble condamnée à regarder passer les trains… que le pays ne possède toujours pas.

Le coup d’État du colonel Mamadi Doumbouya en septembre 2021 marque un tournant. La junte militaire place Simandou au cœur de sa stratégie économique. Le chef de l’État provisoire impose une ligne dure : pas d’exploitation sans garanties pour la Guinée. Il exige des partenaires, notamment chinois et anglo-australiens, une implication dans les infrastructures – voie ferrée et port en eau profonde – indispensables au projet.

En mars 2022, un accord clé est signé entre le Winning Consortium Simandou (WCS) et le géant chinois Baowu Steel. Ce partenariat relance l’espoir d’une mise en exploitation effective. La production est désormais annoncée pour la fin de l’année 2025, mais le scepticisme demeure. La société civile et plusieurs observateurs internationaux appellent à plus de transparence dans la gestion des contrats, craignant que la Guinée ne se retrouve encore lésée dans le partage des bénéfices.

Cliquez ici pour vous abonner à lvoir’Hebdo, meilleur journal d’investigation de Côte d’Ivoire et première meilleure vente

Pour de nombreux Guinéens, Simandou est bien plus qu’un projet minier : c’est un symbole de souveraineté économique, de développement attendu depuis des générations. Le pari de Doumbouya est risqué, mais si la Guinée parvient enfin à transformer ce gisement en richesse partagée, elle pourrait réécrire une partie de son histoire.

Afriksoir

Guinée : « La junte a drastiquement restreint la liberté des médias » (Human Rights Watch)


=

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici