Alors que la Côte d’Ivoire vient d’être classée pays le plus heureux d’Afrique de l’Ouest selon une étude internationale, l’analyste Koné Kobali interroge avec esprit et lucidité la pertinence de ce type de palmarès. Entre ironie fine et questionnements philosophiques, il déconstruit la prétention d’un bonheur mesurable à l’échelle d’un pays, et rappelle que le bonheur, cette notion intime et instable, ne saurait être uniformisé ni décrété par des classements venus d’ailleurs.
À propos du bonheur Houphouët très prévenant nous serinait le fait que : « le vrai bonheur on ne l’apprécie que lorsqu’on l’a perdu », « faisons en sorte de ne jamais le perdre », s’empressait-il d’ajouter ! Je ne connais personne qui ait conscience du bonheur qui l’emmitoufle et qui décide de le perdre par coquetterie ou par excès de zèle ?! Seul le diable imbu de sa méchanceté originelle et à toutes épreuves, peut s’aventurer dans une telle aventure.
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Le bonheur puisque c’est de cette denrée (rare et chère) dont il est question, il n’est jamais mieux défini que par soi-même et pour soi ! Je ne crois pas qu’il ait un consensus mondial autour de cette notion bourrée de caprices instables ? Si c’est le cas c’est tant mieux. J’apprends par le canal de la presse (uniquement) que notre pays selon une approche venue d’ailleurs, d’Europe précisément, a classé notre pays premier, devant tous les autres pays qui composent l’espace Afrique de l’Ouest.
J’avoue que cette information ne m’a pas fait l’effet d’un quelconque bonheur ! Je me pose la question de savoir si les acteurs de cette étude ont élargi leur classement aux trois pays de l’AES et à ceux qui y aspirent ? Est-ce que ce qui fait le bonheur du peuple du Grand Nord est le même critère qui détermine le bonheur du Grand Sud ? Certainement pas !
Le bonheur est-il indispensable à une vie ? La vie d’une personne peut-elle socialement s’émanciper du bonheur ? Quel est la place du bonheur dans une société ? Peut-on faire et conceptualisé au profit d’autrui, son bonheur ? Est-ce que le bonheur d’hier sera le bonheur de demain ? Est-ce qu’il y avait, dans les plans d’ajustement structurels que les pays du tiers-monde ont chacun épousé à tour de rôle comme une camisole de force, des plans du bonheur ?
Est-ce qu’il revient à quelqu’un, qu’il vienne d’oxford ou d’ailleurs, de me dire qu’il sent que je suis, pour le compte de cette année, plus enclin au bonheur que les ressortissants des pays qui m’environnent ? Je serai tenté de lui dire, qu’est-ce que tu en sais et de quoi je me mêle !? Et si le meilleur bonheur était celui dont on n’a aucune conscience ? La dopamine et la sérotonine sont des hormones du bonheur enfuis et en attente dans le cerveau de chacun de nous.
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En Côte d’Ivoire est-ce que le bonheur des uns est le bonheur des autres ? Est-ce que les Ivoiriens se ravitaillent au même robinet du bonheur ? N’y a-t-il pas un réel problème d’accès, un accès limité ? Ces questions sont posées à ceux qui pavoisent depuis la sortie inespérée de cette étude ! Comparaison n’est pas raison, et si notre bonheur « scientifique » était voisin de celui que ressentent les parents d’un enfant qui est le premier de sa classe, sur un effectif de 150 élèves ? A-t-on pensé aux parents qui sont peu fiers de leurs enfants parce que classés après les 20 premiers de cette classe ? Bonheur n’est pas bonheur !!!
Koné Kobali
Libre auteur, créateur
Classement 2024 : Ces pays d’Afrique subsaharienne étranglés par la dette
