Propos polémiques du président français Macron : l’habitude des dérapages

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Le président français, Emmanuel Macron
Le président français, Emmanuel Macron
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Au-delà des dirigeants, c’est une bonne partie de l’opinion publique africaine qui paraît bien choquée par les propos tenus par le président français, Emmanuel Macron, au sujet du départ de certains militaires de son pays, présents sur le sol africain. Ce qui est reproché au locataire de l’Elysée, c’est le ton condescendant, avec lequel il s’est exprimé ce lundi 6 janvier 2025, comme il l’a fait il y a quelques semaines en Haïti ou encore à Mayotte.

C’est à croire qu’il est coutumier des dérapages. Devant des ambassadeurs français avec qui il échangeait ce lundi 6 janvier des vœux de Nouvel An, Emmanuel Macron a tout sauf utilisé le langage diplomatique. Tel un novice en politique, le président français, évoquant le départ des bases militaires françaises en Afrique, s’est laissé aller à des remarques presque désobligeantes à l’égard de certains dirigeants africains.

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« la France n’est pas en recule en Afrique, elle est tout simplement lucide, elle se réorganise. Je dis ça parce que quad je lis une bonne partie de notre presse, et beaucoup de commentaires, les gens, disent : ‘’c’est terrible, on est en train de disparaître en Afrique’’. Non ! On a choisi de bouger en Afrique. On a choisi de bouger, parce qu’il fallait bouger.

Un, on a regardé notre relation passée, mémorielle, culturelle, on la factualise, on l’assume. On se dit la vérité mais, on ne cède rien à la désinformation et aux ingérences. Deux, nous avions une relation sécuritaire. Elle était de deux natures. Une partie, c’était notre engagement contre le terrorisme depuis 2013. On avait raison. Je crois qu’on a oublié de nous dire merci mais, ç’est pas grave, ça viendra avec le temps. L’ingratitude, je suis bien placé pour le savoir. C’est une maladie non-transmissible à l’homme.

Mais, je le dis pour tous les gouvernants africains qui n’ont pas eu le courage vis-à-vis de leur opinion publique nationale de le porter, aucun d’entre eux ne serait avec un pays souverain si l’armée française ne s’était pas déployée dans cette région et j’ai une pensée émue pour nos soldats qui, parfois ont donné leur vie et pendant des années ont combattu. Nous avons bien fait.

On est parti parce qu’il y a eu des coups d’Etat parce qu’on était là à la demande d’Etats souverains qui avaient demandé à la France de venir. A partir du moment où il y a eu des coups d’Etat et que les gens ont dit : ‘’notre priorité, ce n’est plus la lutte contre le terrorisme’’, la France ne mérite plus sa place parce que nous ne sommes pas des supplétifs de putschistes.

Donc, on est parti. Et, ensuite on a décidé -c’est le deuxième volet, de réorganiser notre présence militaire, parce qu’on avait en quelque sorte une rémanence et on nourrissait nous-mêmes un discours post-colonial. Parce que dans les pays d’Afrique francophone, il y avait cette histoire et on avait laissé la présence s’installer dans nos bases. Est-ce qu’elles avaient encore une justification ? Je dis non.

Tous les réseaux d’activistes que j’ai évoqués, disaient : ‘’regardez la France, elle est encore avec 2000 soldats là…’’ et tous les réseaux de désinformation étaient utilisés contre nous (…) Nous avons proposé aux chefs d’Etat africains de réorganiser notre présence. Comme on est très poli on leur a laissé la primeur de l’annonce. Ne vous trompez pas. Parfois, il a fallu pousser. Mais, ce n’est pas parce qu’on est poli et qu’on se réorganise nous-mêmes qu’il faudrait que ce soit retourné contre nous en disant : ‘’ils sont chassés d’Afrique’’. Je peux vous dire que dans bien de ces pays, on ne voulait pas enlever l’armée française ou la réorganiser et on l’a assumé ensemble, c’est ça le partenariat.

Et donc, nous sommes en train d’ouvrir un partenariat de sécurité avec l’Afrique », a expliqué, comme dans un one-man-show, Emmanuel Macron. « Nous avons un agenda qui doit sortir des obsessions du passé. J’ai fait le maximum d’effort et je continuerai de la faire pour regarder les questions historiques, culturelles et mémorielles et je crois que nous l’avons fait avec beaucoup de sincérité ces dernières années », avait-il introduit son speech devant les ambassadeurs.

INDIGNATION GENERALE

Des propos qui font polémique depuis lors, y compris dans le microcosme politique français, où l’on dénonce des propos insultants. Des critiques qui donnent un écho plus retentissant dans le paysage français, aux répliques musclés des gouvernements tchadien et sénégalais.

« Les propos du Président Macron à propos du départ prétendument négocié de l’armée française au Sénégal et au Tchad sont démentis par les deux pays. Encore une fois, la désinvolture et les paroles non maîtrisées aggravent les relations internationales de notre pays », charge Jean-Luc Mélenchon, le leader de la France Insoumise via le réseau social X.

Et, c’est à juste titre que ce farouche opposant à Macron, écrit : ‘’Encore’’. Car, dans ses rapports au continent africain, l’ancien ministre français de l’Economie, a bien souvent fait de telles sorties de route, comme en 2017 au Burkina Faso où, répondant aux complaintes d’étudiants Burkinabè, il avait indiqué :

« Vous me parlez comme si j’étais le président du Burkina Faso! Mais je ne veux pas m’occuper de l’électricité dans les universités au Burkina Faso, c’est le travail du président ». Et, quand l’opinion publique burkinabè, voire africaine, s’était montrée gênée par cette sortie, celui qui a fondé En Marche en 2016, n’a rien eu de mieux à dire pour se justifier que d’invoquer un discours visant à détendre l’atmosphère.

« Considérer qu’on ne peut pas faire de l’humour avec un dirigeant africain, ce serait étrange. J’en fais avec des dirigeants européens, je considère le président Kaboré de la même façon. Le président burkinabé était très heureux de l’échange que nous avons eu avec les étudiants, très heureux de la relation que nous avons, et je peux vous dire, choqué par rien », avait-il réagi quelques jours plus tard lors d’un point de presse à Abidjan, en marge du sommet Europe Afrique de 2017.

LA MAUVAISE PLAISANTERIE DE OUAGA

Et pourtant, il n’a pas eu le courage, ni de reconnaître son erreur, ni de s’excuser, quand il a traité les Haïtiens de ‘’c…’’. En marge du sommet du G20 à Rio, ses propos sur Haïti étaient très loin de la plaisanterie. « Ce sont les Haïtiens eux-mêmes qui ont tué Haïti », avait-il affirmé, dans une séquence presque surréaliste, fustigeant la destitution de l’ancien Premier ministre Garry Conille, qu’il considère comme une « décision absurde ».

Pour Macron, ce Premier ministre représentait une chance de stabilisation et accomplissait un « travail remarquable » avant d’être écarté. « Ils sont complètement c… », avait-il qualifié le Conseil présidentiel de transition, provoquant la colère de nombreux Haïtiens.

COLERE DES HAÏTIENS ET DES MAHORAIS

Les propos ont été jugé si graves, que l’ambassadeur Antoine Michon, qui avait été convoqué, a « reconnu qu’il s’agissait de propos malheureux » prononcés en marge du sommet du G20 à Rio, en novembre 2024. En décembre 2024, c’est-à-dire quelques semaines après la polémique sur Haïti, confronté à la colère des Mahorais, suite aux ravages du cyclone Chido, le chef de l’État français a été ni diplomatique, ni compatissant.

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« Si c’était pas la France, vous seriez 10 000 fois plus dans la merde », avait-il lancé à une dame qui l’interpellait sur l’immigration illégale sur cet île. Et, face au tolet provoqué par cette sortie, Macron, d’expliquer avoir reconnu parmi ses détracteurs des « militants politiques du RN ». Sa grosse méprise, ce lundi 6 janvier, n’est donc qu’un dérapage de plus, même s’il reste aussi grave que les précédents.

Nord-sud Infos

Emmanuel Macron : « Nous avons proposé aux chefs d’État africains de réorganiser notre présence »

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