Depuis les années 1980, la Société des transports abidjanais (Sotra) a été le pilier du transport lagunaire en Côte d’Ivoire. Cependant, l’ouverture du marché à la concurrence en 2015 et une série d’incidents préoccupants ont remis en question la gestion et l’avenir de ce secteur.
Alors que des promesses de réhabilitation et de modernisation des infrastructures restent non tenues, le gouvernement choisit de financer des entreprises privées au détriment du renforcement direct de la Sotra. L’activiste, Jean Christian Konan s’interroge sur les stratégies employées et l’utilisation des fonds publics, soulevant des doutes sur l’efficacité et l’équité de ces décisions.
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En 1980, la première gare lagunaire de la SOTRA est inaugurée au Plateau. Et peu après, trois autres gares firent leurs apparitions dans les communes de Treichville, Abobo-Doumé et Cocody Blockhaus. Dans les années 80/90 les bateaux bus de la SOTRA écument la lagune sans trop d’écueils. Peu d’incidents notables sont à relever. En 2003 une révolution intervient. Le président Laurent Gbagbo déclare et je cite “ Bravo à l’intelligence des ingénieurs, techniciens et de tout le personnel de la SOTRA que tout le pays regarde leur expérience. Ils nous font honneur « .
C’était à l’occasion de l’inauguration du Moossou, le premier bateau-bus fabriqué entièrement dans les ateliers de la SOTRA. En 2015, pour renforcer le transport urbain, le Gouvernement ivoirien a décidé la levée de l’exclusivité d’exploitation du plan d’eau lagunaire que détenait la SOTRA. Ainsi, l’Etat a établi des conventions de concession avec deux nouvelles entreprises de transport lagunaire à savoir la STL et la CITRANS. La même année 2015, un grave incendie se déclare dans un bateau-bus de la SOTRA assurant la liaison entre Treichville et Abobo Doumé dans la commune d’Attécoubé.
En 2017 avec respectivement une concession de l’État de 30 ans sous forme de construction -exploitation-transfert (BOT) pour STL et 25 ans pour Citrans, deux nouveaux opérateurs viennent concurrencer la SOTRA sur la lagune. Cette année-là, un second bateau-bus de la SOTRA prend feu. Un drame évité de justesse du côté de la gare lagunaire d’Abobo Doumé. En février 2018, intervenant lors de la présentation de vœux du personnel, le directeur général de la SOTRA, M. Méité Bouaké, annonce que la SOTRA va entamer la réhabilitation de deux ateliers techniques et le développement des infrastructures d’exploitation lagunaire.
En 2019, la série des 2 ans reprend : un 3e bateau-bus de la SOTRA depuis la libéralisation en 1015, connaît un départ de feu avant accostage à la gare lagunaire du Plateau. Le bateau a été sauvé de justesse avec le secours des matelots, qui ont utilisé les quelques extincteurs à leur portée. En 2021, rebelote, un énième bateau-bus de la SOTRA prend feu au quai de Blockhaus. En 2022, lors des Rencontres annuelles des Mobilités (RAMes2022), lorsqu’il a été question de transport lagunaire et alors que la presse pouvait s’attendre à de bonnes nouvelles concernant les ateliers annoncés comme devant être réhabilités depuis 2018, virage à 360°.
En effet, le directeur du département Études, M. Lath Essis annonce que la SOTRA s’apprête à acquérir une flotte de 50 bateaux-bus de grande capacité. Quid des ateliers devant réhabilités selon le DG depuis 2018. Une veille informationnelle permet de constater que ces acquisitions n’ont jamais eu lieu et que les ateliers techniques et le développement des infrastructures d’exploitation lagunaire SOTRA n’ont à ce jour, pas été remis à neuf comme annoncé 5 ans auparavant par monsieur Meité Bouaké, directeur général de la SOTRA.
5 ans c’est-à-dire de 2018 à 2023, puisque l’année dernière on apprenait que l’Etat allait au contraire construire lui-même les gares et les mettre à la disposition des sociétés de transports lagunaire. En effet, la STL et la CITRANS connaissent des difficultés de fonctionnement liées à leur convention de départ signée avec le gouvernement qui indiquait qu’elles doivent acheter les bateaux et construire les gares lagunaires. Ce qui n’était pas prévu va alors arriver, à savoir que le gouvernement va acheter des bateaux bus pour les mettre à la disposition de ces sociétés de transports lagunaires.
La SOTRA recevra une part de ces bateau-bus, mais ces sociétés privées, créées à grand renfort de publicité, qui devaient, selon la concession octroyée, investir seront au contraire financées par l’État. Elles vont travailler et ensuite rembourser, selon le DG de l’AMUGA, au regard des difficultés auxquelles elles font face. Autrement dit, l’Etat est parvenu et/ou va parvenir à trouver les moyens qui serviront à financer la SOTRA, mais aussi des sociétés privées qui n’ont pas, selon le DG de l’AMUGA, pu respecter leurs engagements, au détriment de la SOTRA qui devra » partager » les fonds publics avec des entités privées.
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Tout ça pour ça ? Il n’aurait pas été plus judicieux de renforcer directement la SOTRA ? Pourquoi utiliser de l’argent public pour renforcer des entités privées qui de surcroît n’ont pas respecté leurs engagements ? Quand on veut noyer un poisson, il y a plusieurs manières de s’y prendre …
Jean Christian Konan
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